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Les défis du transport de marchandises dangereuses conditionnées en colis

Par sa nature même, le secteur du trans­port des matières dan­gereuses, y com­pris sa chaîne logis­tique, est con­fron­té à plusieurs défis (sécu­rité, envi­ron­nement, pro­duc­tiv­ité). Le trans­port des matières dan­gereuses (TMD) con­di­tion­nées en col­is est par­ti­c­ulière­ment com­plexe, notam­ment parce qu’il répond à des exi­gences qui lui sont pro­pres pour des marchan­dis­es très var­iées : bat­ter­ies au lithi­um, aérosols, pein­tures, pro­duits chim­iques en bouteilles, fûts, par­fums, pein­tures, pro­duits de piscines, feux d’artifice, muni­tions… Qu’il s’agisse de for­ma­tion, d’organisation, de com­pé­tences ou encore de con­cur­rence, les prob­lé­ma­tiques sont nombreuses.
 
En France, le TMD représente 5 % du traf­ic routi­er de marchan­dis­es (16 % du traf­ic fer­rovi­aire et 15 % du traf­ic flu­vial). Dans le monde et tous types de trafics con­fon­dus, 15 % des échanges con­cer­nent des matières dan­gereuses. Fuel pour chaudières, essence pour véhicules, bitume pour les routes, pro­duits en bouteilles, essences aro­ma­tiques, alcools forts, médica­ments pour les hôpi­taux…, tous les secteurs d’activité sont con­cernés. Pour les com­man­di­taires, les trans­porteurs et les clients, l’objectif est bien de sat­is­faire une clien­tèle très var­iée tout en garan­tis­sant la sécu­rité du pub­lic et la pro­tec­tion de l’environnement.
 
Ges­tion de la logis­tique et du risque
 
En 2016, en France, sur 174 inci­dents, 57 % rel­e­vaient du trans­port routi­er (14 % con­cer­naient le trans­port fer­rovi­aire et 27 % sont sur­venus au sein d’une ICPE ou instal­la­tion classée pour l’environnement).
 
L’objectif des entre­pris­es (mais aus­si des pou­voirs publics et du monde de la recherche) est de pro­pos­er des out­ils pour mieux éval­uer les risques et y répon­dre de manière adéquate en ayant tou­jours une vue d’ensemble et non un regard axé sur un seul type d’activités. Le défi est de taille, tant il est vrai que les entre­pris­es qui fab­riquent, utilisent ou trans­portent des matières dan­gereuses doivent faire face aux risques à chaque étape, chaque mail­lon de la chaîne logis­tique : sites indus­triels, trans­port, instal­la­tions de stock­age tem­po­raire, activ­ités de chargement/déchargement. D’une manière générale, l’objectif est de ne pas dis­soci­er la ges­tion du risque de la ges­tion logis­tique. Les choix effec­tués dans cette dernière pour des matières dan­gereuses sont inex­tri­ca­ble­ment liés à la ges­tion même du risque. C’est d’autant plus vrai pour les matières dan­gereuses con­di­tion­nées en col­is, mail­lon à part dans l’ensemble de la sup­ply chain TDM. Autrement dit, la stratégie logis­tique de l’entreprise se con­fond avec celles de la ges­tion du risque et vice et ver­sa. L’interaction doit être la règle.
 
Par exem­ple, cer­taines instal­la­tions fix­es sont ten­tées de dimin­uer leurs stocks de matières dan­gereuses. Elles aug­mentent donc les trans­ports et les risques qui y sont liés. D’autre part, il n’est pas rare de voir des entre­pris­es sous-traiter cer­taines de leurs activ­ités (le trans­port surtout) à des sociétés spé­cial­isées qui, elles-mêmes, sous-trait­ent à leur tour. Cela est par­ti­c­ulière­ment vrai pour les matières dan­gereuses con­di­tion­nées en col­is. La mul­ti­pli­ca­tion des acteurs nuit à la bonne ges­tion inté­grale de la chaîne logis­tique. Dans l’évaluation du risque, la ques­tion de la respon­s­abil­ité du ou des expédi­teurs est impor­tante, surtout lorsqu’il y a beau­coup d’intervenants.
 
La for­ma­tion des dif­férents métiers et les sys­tèmes d’information intelligents
 
Parce que les matières dan­gereuses con­di­tion­nées en col­is peu­vent être de natures très hétérogènes et se présen­ter sous dif­férents embal­lages et for­mats, leur trans­port néces­site une con­nais­sance par­faite des risques selon les pro­duits, de leur clas­si­fi­ca­tion, des dif­férentes régle­men­ta­tions en vigueur dans le pays et à l’étranger (spé­ci­fique à cha­cun des modes de trans­port : routi­er, aérien, mar­itime, flu­vial), des autori­sa­tions, ain­si que des exi­gences en matière d’emballage (cer­ti­fi­ca­tions), de manu­ten­tion (iden­ti­fi­ca­tion, éti­que­tage, dan­gers), de manip­u­la­tion (chargement/déchargement) et d’acheminement. Ce dernier point est impor­tant, car il faut notam­ment dis­pos­er de véhicules homo­logués, de matériel de pre­mière inter­ven­tion, et veiller à la bonne sig­nal­i­sa­tion et au plac­ardage des sym­bol­es. Par déf­i­ni­tion, le trans­port de ces col­is peut faire inter­venir plusieurs types de matières dan­gereuses qui appar­ti­en­nent à dif­férentes class­es, com­plex­i­fi­ant un peu plus le tra­vail des dif­férents acteurs de la chaîne. De même, la régle­men­ta­tion en vigueur con­cer­nant les poids autorisés de matières dan­gereuses doit être par­faite­ment con­nue. La for­ma­tion du per­son­nel dans l’ensemble de la chaîne logis­tique est déter­mi­nante et doit être sanc­tion­née par des tests d’évaluation. Des stages sont ain­si pro­posés par des organ­ismes agréés, qui doivent per­me­t­tre d’identifier toutes les étapes oblig­a­toires pour trans­porter par la route ce type de colis.
 
Chaque entre­prise qui est liée au TMD doit désign­er un ou plusieurs con­seillers à la sécu­rité dont le rôle est d’aider à la préven­tion (art. 1.8.3, ADR). Ces con­seillers sont des élé­ments cen­traux, car les pro­duits, très hétérogènes dans leur nature et leur clas­si­fi­ca­tion, présen­tent des fac­teurs de risques dif­férents. En out­re, l’échelle des impacts sur la sécu­rité et sur l’environnement est large. Les procé­dures à respecter sont elles aus­si vari­ables et sou­vent com­plex­es. Expédi­teur, trans­porteur, manu­ten­tion­naire, fab­ri­cant : tous les postes sont cou­verts pour une sécu­rité opti­male, d’un bout à l’autre de la chaîne. Un camion qui charge, trans­porte et fait décharg­er des col­is rem­plis d’ordinateurs, de bouteilles de par­fum ou de bri­quets n’est pas géré de la même manière qu’un autre qui trans­porte des explosifs ou des palettes rem­plies de bouteilles d’éthanol. Notons que les nou­velles dis­po­si­tions de l’ADR entreront en vigueur le 1er juil­let 2019 suiv­ant les mod­i­fi­ca­tions des régle­men­ta­tions inter­na­tionales applic­a­bles depuis le 1er jan­vi­er 2019. Le texte intè­gre notam­ment l’extension à tous les expédi­teurs de marchan­dis­es dan­gereuses de l’obligation de désign­er un con­seiller à la sécu­rité. Grâce à la for­ma­tion, à la sig­nal­i­sa­tion, aux normes des véhicules, aux con­trôles péri­odiques, au tra­vail des con­seillers à la sécu­rité et à toutes les règles qui le régis­sent, le TMD est un des trans­ports routiers qui affiche le plus faible taux d’accidents.
 
Les sys­tèmes de trans­port intel­li­gents (ITS) sont un excel­lent moyen d’optimiser la chaîne logis­tique, en par­ti­c­uli­er dans son volet trans­port, tout en maîtrisant les coûts financiers, et surtout envi­ron­nemen­taux, sans oubli­er le fac­teur déter­mi­nant de la sécurité.
 
Les trans­ferts d’informations en temps réel entre les dif­férents acteurs de la chaîne per­me­t­tent de sur­veiller de manière effi­cace le TMD. Con­duite, état du réseau routi­er, embouteil­lages, acci­dents, itinéraires, géolo­cal­i­sa­tion et con­trôle des marchan­dis­es, l’ITS est un for­mi­da­ble out­il qui per­met de gér­er au mieux les fac­teurs temps et sécu­rité, ce dernier pré­valant sur tous les autres. Bien­tôt, smartroads et Inter­net des objets (Inter­net of Things ou IoT) com­pléteront le dis­posi­tif pour une sécu­rité optimale.
 
Pour autant, si cet out­il numérique est par­ti­c­ulière­ment adap­té, il représente un coût énorme pour un petit trans­porteur et le désa­van­tage face à des con­cur­rents européens capa­bles d’absorber ces dépenses.

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Associant des articles d’analyse spécialisés et des entretiens de décideurs économiques et politiques, EcoLogistics est aujourd’hui la seule revue française entièrement consacrée à l’innovation dans le secteur de la logistique et du transport.

Elle traite tout à la fois de la révolution technologique des drones en matière de transport de marchandises, du stockage 4.0 et de l’intelligence artificielle comme outil d’aide à la décision logistique. La revue aborde également l’ensemble des problématiques relatives à la transition énergétique du secteur transport avec une valorisation des ENR et des moteurs innovants, tous véhicules de transport(s) confondus : GNV/bioGNV, hydrogène, électrique…

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