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Air Flow : logistique, clé du succès

La société Air Flow est spécialisée dans la logistique de stockage et de transport de gaz. Pour son directeur, Pierre Fiat, la réussite des projets hydrogène implique une réflexion en amont de la logistique, le transport d’hydrogène par route pouvant générer des coûts importants. Éléments de réflexion.

Rayon d’action de l’hydrogène

« En matière logistique, chaque gaz a son propre rayon d’action, indique Pierre Fiat. Le rayon d’action est la distance économiquement compétitive entre le point de production et le point de consommation. Plus un gaz est difficile à produire, cher à fabriquer, plus son rayon d’action est important. C’est le cas de l’hélium qui compte une toute petite dizaine de zones de production dans le monde. A contrario, plus un gaz est bon marché, facile à produire, plus son rayon d’action est faible. C’est le cas, par exemple, du dioxyde de carbone, de l’azote ou de l’hydrogène. Nous estimons chez Air Flow que l’hydrogène gazeux comprimé, pour ses applications dans le domaine de la chimie, a un rayon d’action d’environ 150 km. En observant la carte des grandes unités de production françaises d’hydrogène, vous noterez qu’elles sont distantes d’environ 300 km les unes des autres. La plupart des consommateurs d’hydrogène français sont situés à une distance inférieure à 150 km de tout point de production. En dessous d’une distance de 50 km entre le point de production et le point de consommation, le prix de la molécule est surtout constitué des coûts de production, des taxes et des marges. Au-delà de 250 km, le coût du transport constitue la part dominante du prix de vente. Mais lorsqu’il est utilisé comme vecteur d’énergie, l’hydrogène est cher à transporter et peu compétitif par rapport aux autres énergies carbonées : diesel ou gaz naturel liquéfié. Son rayon d’action est donc encore plus limité. Le manque d’anticipation des coûts de transport routier et de stockage peut remettre en cause des projets hydrogène. »

Équation à deux inconnues

Pour Pierre Fiat, optimiser le coût du transport/stockage revient à résoudre une équation à deux inconnues indirectement dépendantes l’une de l’autre :

– la première inconnue est le coût du déplacement, qui se mesure en euros par kilowattheure transporté ;

– la seconde inconnue est le coût du stockage. Cette inconnue doit se mesurer en euros par kilowattheure transporté et non pas en euros par kilowattheure stocké.

« Ces deux inconnues ont des relations indirectes et aléatoires. Par exemple, si votre point de production et vos points de consommation sont particulièrement éloignés, vos coûts de déplacement seront plus élevés, mais vos coûts de stockage également. Un déplacement plus loin dure plus longtemps et les temps de stockage augmentent proportionnellement. Il vous faudra alors plus d’équipements pour stocker votre hydrogène, avec les coûts afférents.

Pour réduire les coûts de stockage, certains réduisent la taille des équipements. Mais alors, la fréquence des livraisons augmente pour assurer la continuité de fourniture. Et le prix du déplacement augmente !

Pour améliorer les coûts de transport, les acteurs de l’hydrogène s’orientent intuitivement vers des stockages à haute capacité (stockage d’hydrogène comprimé de type 2, 3 ou 4, pression de service de 300 ou 450 bars, voire stockages cryogéniques). Ces équipements permettent effectivement de réduire le coût unitaire par kilowattheure déplacé. On comprend la logique de ces décideurs. Mais ces stockages sont chers, non seulement à l’investissement, mais aussi en frais de maintenance. D’autant qu’une logistique hydrogène comprimé exige nécessairement un minimum de trois stockages : un au remplissage à la production, un transporté sur camion et un en vidange au point de consommation. L’expérience montre que, dans notre équation prix à deux inconnues, la part du stockage est souvent supérieure à la part du déplacement. Surtout lorsque l’on utilise des appareils à haute capacité de pression. C’est pourquoi, à ce jour, plus de 95 % de la flotte de transport d’hydrogène comprimé en Europe est composée d’équipements de type 1, à pression de service de 200 bars, peu gourmands en CAPEX et raisonnables en coût de maintenance. Chez Air Flow, nous ne pensons pas que cette proportion évoluera beaucoup à court terme. Nous avons comparé la performance des tubes trailers type 1 pression 200 bars et des tubes trailers type 4 pression 320 bars. Le type 4 est économiquement plus intéressant lorsqu’il faut transporter tous les jours le gaz sur une distance de 150 km. Si l’on passe à une fréquence tous les trois jours, le type 4 devient plus cher que le type 1. Nous conseillons toujours à nos clients de démarrer leur projet logistique hydrogène comprimé avec des stockages de type 1, et d’évoluer plus tard vers des équipements de type supérieur, après retour d’expérience.

Énergie transportée

Un camion d’hydrogène comprimé type 1 transporte très peu d’énergie : 36 fois moins qu’un camion de transport de diesel. Le coût du stockage au point de consommation et au point de production est aussi plus élevé, dans un rapport de 1 à 10.

Beaucoup de clients viennent nous voir avec de remarquables projets de production d’hydrogène bon marché et/ou vert, avec une idée très précise des points et des volumes de consommation. Ils travaillent parfois des années avec enthousiasme sur les aspects production et consommation, sans se soucier de la logistique. C’est lorsque le projet est bien mûr qu’ils s’y intéressent enfin. Et c’est parfois la déconvenue : les projets perdent leur viabilité à cause du coût du kilowattheure transporté et stocké, et ce malgré les aides publiques considérables, malgré les sources d’énergie parfois très bon marché, malgré une demande forte en énergie verte. Si vous avez un projet énergétique hydrogène, étudiez en priorité la question logistique. Moins il y a de transport routier, plus votre projet hydrogène a de chances de réussir. »

Air Flow 

Créée en 2004, la société Air Flow est un spécialiste de la logistique du gaz. Avec ses 35 salariés, elle offre des solutions pour le stockage et le transport de gaz comprimés et cryogéniques, avec un engagement de garantie de qualité. Elle dispose d’une large flotte d’équipements de stockage et de transport de gaz : conteneurs et citernes roulantes cryogéniques, tubes trailers, cadres et bouteilles haute pression… Air Flow travaille pour des projets aussi variés que des plates-formes pétrolières, des mines, des sites industriels, mais aussi des projets territoriaux.

La société dispose de plates-formes logistiques sur plusieurs continents : Anvers, Algeciras (Gibraltar), Houston, Marseille, Singapour et Hong Kong. Ces plates-formes permettent de stocker et surtout d’entretenir ces équipements très spécifiques, qui nécessitent un savoir-faire unique. Sa clientèle internationale comprend de grands groupes industriels tels que Air Liquide, Linde, Engie… Air Flow est actif depuis 15 ans dans le secteur de l’hydrogène. Elle propose aux acteurs des stockages haute pression et un vrai savoir-faire pour leur transport.

À propos de l'auteur

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Créée fin 2015 sous la forme d’un supplément thématique de Green Innovation, la revue Hydrogen+ est la plus ancienne et la seule publication internationale en langue française consacrée au marché de l’hydrogène, à son actualité et aux innovations de la filière. Diffusé sur les principaux salons professionnels, sur support numérique et par abonnement, Hydrogen+ constitue un outil d’information et d’influence unique de la filière hydrogène. Déploiement de la filière, mobilité, transport lourd ou encore industrie, Hydrogen+ couvre l’ensemble des sujets qui occupent la filière et se veut être un outil dédié à son développement. Hydrogen+ est par ailleurs partenaire des principaux événements professionnels en France et en Europe, ainsi que des principaux acteurs associatifs du secteur.

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