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Loi climat : la place de l’hydrogène

L’association France Hydrogène a analysé la loi climat sous l’angle de la filière hydrogène. Elle nous livre une analyse de ses implications, du financement d’hydrogène décarboné à la mobilité en passant par le stockage. Explications exhaustives.

Loi climat et résilience : quelles nouveautés pour l’hydrogène ? Telle est la question sur laquelle s’est penchée France Hydrogène. Le Parlement vient en effet d’adopter le 20 juillet la loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » (validée le 24 août), après un accord de compromis trouvé entre les deux chambres. Reprise d’une partie des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat, la loi a été considérablement enrichie par les députés et sénateurs au cours de son parcours parlementaire, passant d’une soixantaine d’articles initiaux à 305 articles aujourd’hui.

Parmi les apports des parlementaires, de nouvelles mesures concernent tout spécifiquement l’hydrogène. Avec l’ambition du gouvernement de faire de l’hydrogène renouvelable et bas carbone un levier de la transition écologique, ce vecteur énergétique fait l’objet d’une nouvelle législation, encore en cours d’adaptation, visant à faciliter son déploiement dans le système énergétique.

Financement par les territoires

Défendue par France Hydrogène, proposée par plusieurs députés et sénateurs, c’est finalement à l’initiative d’un amendement gouvernemental au Sénat que le financement de la production d’hydrogène décarboné par les collectivités territoriales, une mesure contenue à l’article 88 de la loi climat, a été introduite.

Elle ouvre la possibilité pour les communes et intercommunalités qui le souhaitent d’aménager, d’exploiter, ou de faire aménager et exploiter par un tiers des installations de production d’hydrogène renouvelable ou bas carbone sur leurs territoires.

Une possibilité qui leur était déjà offerte pour les installations de production d’énergies renouvelables, de valorisation des déchets ou de cogénération, et qui devrait faciliter la constitution de consortiums entre collectivités territoriales et industriels pour l’émergence d’hydrogène vert, rappelle France Hydrogène dans son communiqué.

Dans la même direction, cet article permet également aux communes et intercommunalités, de même qu’aux régions et départements de participer au capital d’une société anonyme ou d’une société par actions simplifiée dont l’objet social est la production d’hydrogène renouvelable ou bas carbone par des installations situées sur leur territoire ou sur des territoires situés à proximité. Un tel choix devant résulter d’une délibération de leur organe délibérant.

Appel à stockage

À l’Assemblée nationale, les députés ont acté à l’article 85 la création d’un nouvel appel d’offres pour développer des capacités de stockage d’électricité, qui pourra être activé par les pouvoirs publics lorsque l’atteinte des objectifs de la PPE sera jugée insuffisante ou lorsque RTE mettra en évidence des besoins de flexibilité. C’est ce dernier qui aura la main pour organiser la concertation avec les filières concernées et Enedis sur les modalités techniques de mise à disposition des flexibilités sur le système électrique. Après mises en concurrence, RTE analysera et classera les offres qui seront sélectionnées par le ministère de la Transition écologique. Le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité conclura enfin un contrat rémunérant les capacités de stockage des lauréats.

À cet égard, le dispositif prévoit explicitement que la procédure d’appels d’offres doit distinguer les différentes solutions de stockage, parmi lesquelles l’hydrogène, les batteries et les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP). Un décret doit venir préciser ces aspects. France Hydrogène rappelle au passage que, selon RTE, les besoins de stockage et de flexibilité du système électrique ne devraient émerger qu’à compter de 2030–2035, selon les scénarios dans lesquels l’hydrogène peut servir de solution de stockage saisonnier.

Stockage souterrain

Vaste chantier en préparation, la réforme du Code minier prévue à l’article 81 doit faire l’objet d’une ordonnance du gouvernement prise dans un délai de 15 mois après la publication de la loi.

Au menu de cette ordonnance, le gouvernement devra notamment s’atteler à préciser « les régimes légaux des stockages souterrains et des mines afin, notamment, de définir les modalités de leur extension à d’autres substances, comme l’hydrogène ». Il s’agit ici de poursuivre un chantier déjà entamé avec l’ordonnance hydrogène, consistant à normaliser et à simplifier l’octroi de titres miniers pour les projets de stockage souterrain d’hydrogène. Cela vise à la fois les permis exclusifs de recherches pour identifier une formation souterraine apte au stockage, dans un premier temps, et les titres d’exploitation (concession) pour l’exploiter, dans un second temps.

Plusieurs projets de stockage souterrain d’hydrogène dans des cavités salines ou d’anciens sites de stockage de gaz naturel sont en développement en France à horizon 2025. C’est le cas d’HyGreen Provence à Manosque (région Sud), d’HyPSTER sur le site d’Etrez (AURA), d’Emil’HY à Saint-Avold (Grand-Est), ou d’HyGéo à Caresse-Cassaber (Nouvelle-Aquitaine). Une récente étude évalue les besoins en stockage d’hydrogène de la France à 8 TWh dès 2030 (puis 40 TWh en 2050), ce qui implique d’enclencher rapidement les premiers chantiers.

Les activités de recherche, de création, d’essais, d’aménagement ou d’exploitation de cavités ou de formations souterraines aptes au stockage de l’hydrogène doivent donc être soumises au droit commun du Code minier. Mais pour accélérer le déploiement de ces projets, il conviendrait de simplifier les procédures qui relèvent d’une part du régime légal des mines (Code des mines), d’autre part du régime légal du stockage souterrain (Code de l’environnement). La nécessité d’obtenir un permis exclusif de recherches de stockage d’hydrogène devrait être levée pour tous les projets visant à la reconversion de cavités salines et formations souterraines abandonnées, déjà connues et identifiées.

Aides à l’acquisition de véhicule

En matière de mobilité, les parlementaires ont aussi consolidé l’existant et créé un nouvel outil. Le dispositif de suramortissement fiscal pour l’acquisition de poids lourds à hydrogène a été prolongé avec l’article 133 de la loi, qui le proroge jusqu’à 2030 contre 2024 précédemment. Dans le détail, il permet aux entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou sur le revenu de pratiquer des déductions équivalentes à 20 % de la valeur du bien pour des véhicules utilitaires à hydrogène entre 2,6 et 3,5 tonnes, à 60 % de sa valeur pour des poids lourds à hydrogène entre 3,5 et 16 tonnes et à 40 % pour ceux au-delà de 16 tonnes.

Les sénateurs ont également obtenu en CMP la création d’un prêt à taux zéro pour aider les particuliers et les entreprises à financer l’acquisition de véhicules à faibles émissions (article 107), dès lors qu’ils sont domiciliés dans une zone à faibles émissions ou à proximité, zones qui seront progressivement étendues dans les agglomérations françaises. Il sera mis en place à partir de 2023, pour une période expérimentale de deux ans. Les véhicules concernés doivent être de moins de 2,6 tonnes et émettre moins de 50 gCO2/km, ce qui qualifie de fait les véhicules à pile à combustible et les véhicules à batterie électrique.

PPE et garanties d’origine

Enfin, les sénateurs ont souhaité ajouter une série de modifications ciblées pour l’hydrogène au travers d’un article spécifique, devenu l’article 87 de la loi.

Il s’agit tout d’abord de s’assurer que l’hydrogène renouvelable et bas carbone figurera bel et bien au menu de la prochaine PPE, programmée pour 2023, via une loi quinquennale qui sera discutée et votée par le Parlement. Rendez-vous est pris à cette échéance pour déterminer les grandes orientations du développement de la filière dans notre système énergétique.

Les sénateurs ont ensuite élargi aux intercommunalités et métropoles la possibilité de préempter à titre gratuit des garanties d’origine d’hydrogène renouvelable ou bas carbone émises pour des installations d’électrolyse aidées situées sur leur territoire, ce qui ne relevait là que d’une option offerte aux communes ; c’est une adaptation logique.

Enfin, sur le volet de la simplification administrative, ils ont introduit des souplesses pour l’implantation sur le domaine public de l’État d’électrolyseurs soutenus par les futurs appels d’offres de l’État pour la production d’hydrogène décarboné (horizon 2022). Les lauréats se verront en tel cas attribuer un accord de principe à la délivrance de titres d’occupation, sans procédure de mise en concurrence.

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