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De la crise sanitaire à la chaîne d’approvisionnement 4.0

La pandémie de Covid-19 a dure­ment affec­té le monde, non seule­ment en ter­mes de san­té, mais aus­si en ter­mes d’économie. Les chaînes d’approvisionnement des dif­férentes indus­tries ont été forte­ment sous ten­sion et ont dû batailler pour éviter l’interruption de leurs flux. Mais là où il y a crise, il peut aus­si y avoir des opportunités.

La pandémie de Covid-19 est apparue au moment même où les chaînes d’approvisionnement allaient entr­er dans la qua­trième révo­lu­tion indus­trielle. L’utilisation des tech­nolo­gies de l’industrie 4.0 est dev­enue un impératif stratégique pour la sup­ply chain afin d’être plus con­cur­ren­tielle sur le marché. Dans ce con­texte, les tech­nolo­gies dites de rup­ture jouent déjà un rôle cru­cial pour amélior­er les per­for­mances de ces chaînes et pour garan­tir d’excellents résultats.

Si l’industrie 4.0 a été pour la pre­mière fois présen­tée lors de la Foire de Hanovre, en 2011, cette notion est aujourd’hui large­ment dis­cutée lors de con­férences à tra­vers le monde. L’industrie 4.0 est égale­ment inté­grée dans les pro­jets gou­verne­men­taux en Alle­magne, en France, aux États-Unis, au Japon, au Roy­aume-Uni ou en Chine. Ce terme regroupe les notions de struc­ture organ­i­sa­tion­nelle, de pro­duc­tion à flux ten­dus, de petites et moyennes entre­pris­es, de ges­tion stratégique ou encore de per­for­mances, et bien sûr de nou­velles technologies.

La chaîne d’approvisionnement 4.0 pour sa part regroupe aus­si bien les défis tech­nologiques que les prob­lèmes liés à la ges­tion ou encore la ques­tion de la résilience. Cette dernière peut être d’ailleurs com­prise à tra­vers trois per­spec­tives : la pré­pa­ra­tion, la réponse et l’adaptation, et la récupéra­tion ou l’ajustement.

La chaîne d’approvisionnement 4.0

La chaîne d’approvisionnement 4.0 est car­ac­térisée par l’implantation de tech­nolo­gies de rup­ture qui jouent un rôle déter­mi­nant dans la mue qu’elle doit opér­er. Ces tech­nolo­gies sont le big data, l’Internet des objets (IoT), l’intelligence arti­fi­cielle (IA), la 5G, le cloud, la blockchain, la robo­t­ique et la réal­ité augmentée.

Ces tech­nolo­gies jouent un rôle cen­tral dans l’amélioration des procédés d’approvisionnement qui eux-mêmes aug­mentent la réac­tiv­ité de la chaîne d’approvisionnement. Trans­parence, effi­cac­ité (traite­ment des don­nées en temps réel, par exem­ple), flex­i­bil­ité, réac­tiv­ité et col­lab­o­ra­tion (avec les four­nisseurs et les détail­lants) sont les qual­ités vers lesquelles les entre­pris­es du secteur logis­tique doivent impéra­tive­ment tendre.

Plusieurs études ont mis en avant les béné­fices apportés par les tech­nolo­gies de rup­ture comme l’IoT, l’IA, le cloud, la blockchain ou encore la robo­t­ique. Il n’est pas éton­nant de con­stater que de grandes sociétés comme Ama­zon ou Google ont pris ce virage très tech­nologique depuis un cer­tain temps.

Ce phénomène est en réal­ité plus fort encore avec la pandémie de Covid-19. Une étude menée par Guil­herme F. Fred­eri­co (« Sur­vey report : dis­rup­tive tech­nolo­gies and respon­sive­ness of sup­ply chains amid the Covid-19 pan­dem­ic : a glob­al per­spec­tive », Fed­er­al Uni­ver­si­ty of Parana, School of Man­age­ment, juil­let 2020) a mon­tré la répar­ti­tion des tech­nolo­gies dans les impacts posi­tifs qu’elles ont pu avoir dans la chaîne d’approvisionnement en pleine crise san­i­taire : big data (86 %), IoT (78,7 %), cloud (82,7 %), robo­t­ique (73,3 %), blockchain (59,3 %).

Tech­nolo­gies de rup­ture et effi­cac­ité de la sup­ply chain

L’Internet des objets est l’une des tech­nolo­gies clés de la chaîne d’approvisionnement, tant dans le domaine physique que dans les domaines infor­ma­tique ou cyber. Avec l’IA, la robo­t­ique et le cloud, il forme un ensem­ble d’atouts per­me­t­tant à la chaîne d’approvisionnement d’être mieux con­trôlée et de s’auto-exécuter plus effi­cace­ment. Par exem­ple, en amont des flux, les four­nisseurs sont plus réac­t­ifs face aux change­ments de la demande, ce qui leur per­met en out­re de mieux gér­er les inven­taires. Com­ment ? Grâce à des infor­ma­tions et à des don­nées trans­mis­es plus rapi­de­ment, avec plus de trans­parence et disponibles dans le cloud. D’un bout à l’autre de la chaîne, les temps de réponse sont beau­coup plus courts. Notons égale­ment l’utilisation de plus en plus fréquente de la réal­ité aug­men­tée qui per­met de mieux for­mer les opéra­teurs dans des con­di­tions sem­blables à la réal­ité et de sim­pli­fi­er cer­tains proces­sus de stock­age ou de livraison.

L’enjeu de la for­ma­tion est de taille, car le secteur de la sup­ply chain devrait recruter forte­ment ces prochaines années. Dans les entre­pôts, la réal­ité aug­men­tée peut offrir aux opéra­teurs des don­nées en temps réel sur le posi­tion­nement des marchan­dis­es, les engins les plus utiles ou les itinéraires les plus pertinents.

En aval, les béné­fices sont égale­ment per­cep­ti­bles sur les flux de la chaîne d’approvisionnement. La demande, du marc­hand jusqu’au client final, peut être trans­mise directe­ment aux cen­tres de dis­tri­b­u­tion et aux détail­lants grâce à l’utilisation du cloud, de l’IoT, de l’IA et de la robo­t­ique. Il est pos­si­ble de génér­er des proces­sus automa­tiques comme la récep­tion, la cueil­lette et la répar­ti­tion des com­man­des. Cela améliore sig­ni­fica­tive­ment l’efficacité et la réac­tiv­ité dans les proces­sus de livraison.

En étant inté­grées dans la sup­ply chain, ces tech­nolo­gies génèrent énor­mé­ment de don­nées. Leur analyse joue un rôle stratégique en les trans­for­mant en infor­ma­tions classées selon leur impor­tance. L’analyse de don­nées est dès lors un avan­tage con­cur­ren­tiel qui per­met aux ges­tion­naires de pren­dre des déci­sions plus rapi­de­ment lors d’évènements soudains.

Pour parachev­er le tout, toutes ces tech­nolo­gies doivent être interopérables. L’interopérabilité (la capac­ité de com­mu­ni­ca­tion et d’intégration entre les tech­nolo­gies) est une con­di­tion essen­tielle de l’efficacité des leviers tech­nologiques. L’objectif est bien de dis­sémin­er des cap­teurs partout où cela est pos­si­ble, d’automatiser tout ce qui peut l’être et d’analyser l’ensemble des don­nées pour amélior­er les per­for­mances de l’entreprise et, bien sûr, la sat­is­fac­tion des clients.

Avec la pandémie de Covid-19, les chaînes d’approvisionnement ont fait face à leur plus grand défi. Leur ges­tion doit être repen­sée à l’aune de ses approches stratégiques qui offriront des garanties face aux évène­ments imprévus et par­fois bru­taux. C’est dans ce con­texte qu’il faut penser la chaîne d’approvisionnement 4.0 totale­ment inté­grée à l’industrie 4.0 et à ses tech­nolo­gies de rupture.

Ne pas oubli­er le risque cyber

Si elle est stratégique à maints égards, la numéri­sa­tion de la sup­ply chain expose aus­si les entre­pris­es à des risques cyber.

Qual­ité des ser­vices pour les clients, coûts avan­tageux : la chaîne d’approvisionnement est dev­enue stratégique. Mais elle est égale­ment dev­enue plus com­plexe dans l’ensemble de ses phas­es, de la com­mande du client jusqu’à la livrai­son, en pas­sant par la fab­ri­ca­tion, la ges­tion des stocks et l’expédition. C’est bien dans ce con­texte de com­plex­i­fi­ca­tion, mais aus­si de den­si­fi­ca­tion des échanges, que le numérique apporte ses bénéfices.

Le numérique per­met ain­si de sécuris­er la com­mu­ni­ca­tion entre l’émetteur d’un ordre et son sous-traitant.

L’analyse mas­sive de don­nées et l’intelligence arti­fi­cielle (IA) sont des out­ils qui per­me­t­tent de mieux repér­er les défail­lances de sous-trai­tants et d’anticiper de graves prob­lèmes, comme des rup­tures d’approvisionnement. L’IA peut aus­si pro­pos­er des actions pour cor­riger le tir, comme iden­ti­fi­er de nou­veaux four­nisseurs plus sûrs.

La numéri­sa­tion d’applications métiers sur le cloud accélère aus­si l’harmonisation des sys­tèmes d’information, per­me­t­tant à une entre­prise, en cas de prob­lème majeur, de ne pas subir de rup­ture dans son système.

Mais la sup­ply chain 4.0 n’est pas sans risques. Une récente étude d’Accenture mon­trait que 60 % des cyber­at­taques frap­paient la chaîne d’approvisionnement. En juil­let 2021, une étude de l’European Union Agency for Cyber­se­cu­ri­ty (ENISA) indi­quait que 62 % des cyber­at­taques repo­saient sur des mal­wares ; que 58 % de ces attaques avaient pour but d’accéder aux don­nées ; que 62 % des attaques exploitaient la con­fi­ance qu’ont les clients envers leurs four­nisseurs. Le don­neur d’ordre lui-même n’est plus à l’abri d’une attaque extérieure lancée par un hack­er, ou d’une infec­tion venant de l’un de ses parte­naires. La pro­tec­tion cyber, même effi­cace, n’est plus suff­isante pour les entre­pris­es lorsque les hack­ers s’attaquent aux four­nisseurs ou aux sous-traitants.

Or, avec la mul­ti­pli­ca­tion des acteurs, les risques sont de plus en plus élevés. En 2013, le sys­tème d’information de la chaîne de mag­a­sins améri­cains Tar­get a été pénétré par des cyber­crim­inels qui ont util­isé le sys­tème de main­te­nance de la cli­ma­ti­sa­tion géré par un sous-traitant.

En réal­ité, le moin­dre prob­lème sur la sup­ply chain peut entraîn­er de nom­breux dom­mages, par­fois cat­a­strophiques. La solu­tion est de pouss­er les sous-trai­tants à adopter une véri­ta­ble stratégie de cyber­sécu­rité du même niveau que celle du don­neur d’ordre.

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Associant des articles d’analyse spécialisés et des entretiens de décideurs économiques et politiques, EcoLogistics est aujourd’hui la seule revue française entièrement consacrée à l’innovation dans le secteur de la logistique et du transport.

Elle traite tout à la fois de la révolution technologique des drones en matière de transport de marchandises, du stockage 4.0 et de l’intelligence artificielle comme outil d’aide à la décision logistique. La revue aborde également l’ensemble des problématiques relatives à la transition énergétique du secteur transport avec une valorisation des ENR et des moteurs innovants, tous véhicules de transport(s) confondus : GNV/bioGNV, hydrogène, électrique…

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