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Mix énergétique : la place de la cogénération

La cogénération semble avoir été oubliée du mix énergétique et en particulier du biogaz. Avec des rendements énergétiques de près de 90 %, elle a pourtant des atouts sérieux et est particulièrement adaptée à certaines configurations. Retour sur une technologie qui s’intègre dans un mix énergétique efficace.

Le contrat BG16 de cogénération avec du biogaz indique que ce choix est possible sur de petites installations (inférieures à 300 kW), mais que l’injection doit être étudiée de 300 à 500 kW et obligatoire au-delà. Or, dans certaines configurations, la cogénération peut avoir un intérêt. Pour des sites éloignés des réseaux, qui demandent un raccordement coûteux ou pour des sites proches d’un réseau saturé à certaines périodes, l’injection n’est pas intéressante énergétiquement parlant. Par ailleurs, dans le cas d’une utilisation de chaleur agricole (serres, cultures d’algues, séchage…) ou de chauffage de bâtiments proches, la cogénération est le système énergétique le plus performant. Enfin, sur certains sites existants, cette législation empêche d’utiliser un potentiel de production supérieur, alors qu’ils pourraient produire un surplus d’énergie facilement.

Difficulté supplémentaire, fin 2021 un texte de loi impliquait l’augmentation des contrôles de conformité pour la valorisation du biogaz par cogénération (décret no 2021–1691 du 17 décembre 2021 relatif à l’obligation de transmission d’une attestation de conformité aux prescriptions mentionnées à l’article R. 311–43 du code de l’énergie et portant modification de la partie réglementaire du code de l’énergie relative à la production d’électricité et à la vente de biogaz.) Conséquence de ces restrictions, la quantité d’énergie biogaz injectée est désormais plus importante que celle produite en cogénération. La cogénération ne progresse plus, avec environ 900 sites fin 2021 contre 365 en injection, ces derniers étant donc en moyenne de taille plus importante.

En effet, comme le rappelait notre confrère France agricole dans un article paru en septembre 2021 « pour la valorisation du biogaz en cogénération, la dynamique est, quant à elle, au point mort. Seules deux unités ont été raccordées au second trimestre. Depuis le début de l’année 2021, elles sont au nombre de 33, pour une puissance cumulée de 7 MW (Mégawatts). Sur cet intervalle de temps, la production d’électricité à partir de biogaz s’élève à 1,3 TWh. La capacité de production a augmenté de 1 % depuis le début de l’année. »

Baisse des aides

Concernant le projet de loi de finances 2022, le Sénat indique que les crédits affectés au programme « Service public de l’énergie » baissent globalement de 700 millions d’euros par rapport à 2021. Il rappelle, alors que le soutien à l’injection de biométhane progresse de 31 % pour atteindre près de 713 millions d’euros : « En phase d’extinction, le soutien à la cogénération au gaz naturel poursuit son érosion en se réduisant de 3,4 % à 646,1 millions d’euros. La “cogénération” renvoie à la production combinée de chaleur et d’électricité par des installations fonctionnant au gaz naturel. Ce processus permet d’atteindre des rendements énergétiques globaux supérieurs à ceux obtenus via la production séparée de chaleur (chaudières) et d’électricité (centrales électriques) et de générer ainsi des économies d’énergie primaire. La chaleur produite est généralement utilisée par injection dans un réseau de chaleur ou pour un processus industriel. »

« Pour soutenir la cogénération au gaz naturel, l’État oblige EDF et les entreprises locales de distribution d’électricité à conclure des contrats d’obligation d’achat ou de complément de rémunération avec les installations de cogénération à haute performance énergétique de moins de 12 MW. En contrepartie, il compense aux distributeurs d’électricité l’intégralité des surcoûts générés par ces mécanismes de soutien. L’État apporte également un soutien transitoire aux installations de cogénération de plus de 12 MW. Conformément à la nouvelle PPE adoptée au mois d’avril, le dispositif de soutien à la cogénération a été abrogé à compter du 23 février 2021 en application d’un décret du 21 août 2020. Depuis cette date, les installations de cogénération à partir de gaz naturel ne sont plus éligibles à un soutien et aucune nouvelle demande de contrat ne peut donc être acceptée. Dans la mesure où les producteurs disposent d’un délai de deux ans pour mettre en service leur installation, plus aucune nouvelle centrale ne sera soutenue à compter du début de l’année 2023. Il convient toutefois de noter que les contrats en cours ne seront pas impactés et que les surcoûts qui en résultent continueront à être compensés. »

« Dans sa délibération du 15 juillet 2021, la CRE a revu à la baisse ses prévisions des soutiens de l’État à la cogénération. Ainsi, ils devraient s’élever à 669 millions d’euros en 2022. »

« Les installations de cogénération devraient produire 5,5 TWh en 2022, une production en baisse respectivement de 14 et 24 % par rapport à celle prévue en 2021 (6,4  Wh) et à celle constatée en 2020 (7,2 TWh). »

Au moment où nos dirigeants politiques semblent découvrir l’importance d’une autonomie énergétique et donc du maximum de production d’énergie sur notre territoire, ce rapport étonne, car il indique la baisse des aides tout en rappelant que la cogénération permet de bons rendements.

Les atouts de la cogénération

En effet, comme nous le rappelle l’ATEE Club Biogaz, « la cogénération est avant tout un outil de production de chaleur et est dimensionnée pour répondre aux besoins de chaleur du site sur lequel elle s’implante. Elle combine également une production d’électricité au cours de laquelle on récupère simultanément la plus grande partie de la chaleur émise. Elle est ainsi l’outil de production d’électricité par voie thermique le plus efficace sur le plan énergétique par rapport aux autres moyens de production d’électricité de ce type, qu’ils soient alimentés par des sources EnR ou fossiles. »

« La chaleur est (auto)consommée sur le site de production, où elle peut alimenter – pour des besoins de chauffage, de production d’eau chaude sanitaire ou de procédés industriels – des immeubles résidentiels/tertiaires ou collectifs, des bâtiments raccordés à un réseau de chaleur, des serres ou des sites industriels (chimie, papeterie, industrie automobile, agroalimentaire). L’électricité qui n’est pas autoconsommée sur le site de production ou par des consommateurs tiers (autoconsommation collective) est injectée sur le réseau public. »

Point important, « la cogénération consomme entre 15 % et 30 % d’énergie primaire en moins que les meilleurs outils disponibles pour produire séparément les mêmes quantités de chaleur et d’électricité, soit une chaudière à condensation gaz et une centrale à cycle combiné gaz. Ces économies d’énergie primaire sont à associer à la meilleure performance énergétique globale de la cogénération, à laquelle viennent s’ajouter les pertes des réseaux électriques évitées du fait de la proximité des points de consommation (jusqu’à 15 % dans les réseaux basse tension et 6,5 % dans ceux à haute tension). »

« Tout en répondant à un besoin de chaleur de la même manière qu’une chaudière, la cogénération constitue donc une source d’économies importantes d’énergie primaire d’origine fossile et de réduction des émissions de CO2. »

« Globalement, ces économies d’énergie primaire ont été évaluées, pour le parc actuel d’installations, à environ 17 % par rapport aux meilleurs outils de productions séparées (ce qui représente une économie d’énergie primaire de l’ordre de 6,5 TWh de gaz naturel et 1,36 million de tonnes de CO2 évitées). Ces économies pourraient être portées à 25 % avec les nouvelles installations équipées notamment de récupérateurs à condensation. »

« Enfin, dans un contexte où les raccordements de sources de production électrique intermittentes se multiplient, la cogénération représente un outil extrêmement pertinent pour soutenir le réseau électrique : les 1 800 MW de cogénérations industrielles concernées par le contrat de capacité instauré de 2014 à 2016 ont présenté une disponibilité aux pointes de consommation supérieure à 95 %. »

Signé en août 2020, le décret no 2020–1079 a supprimé l’éligibilité au complément de rémunération et à l’obligation d’achat pour les installations de cogénération d’électricité et de chaleur valorisée à partir de gaz naturel. Pourtant, la cogénération a toute sa place dans un mix énergétique et il serait souhaitable que le prochain gouvernement en tienne compte, au moment où nos dirigeants politiques semblent découvrir l’importance d’une autonomie énergétique et donc de la production d’un maximum d’énergie sur notre territoire. 

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