Espace partenaires Magazine Green Innovation

Quelles solutions pour décarboner l’agriculture ?

Green­Flex a mené l’étude « Com­ment accélér­er les efforts d’atténuation du dérè­gle­ment cli­ma­tique en agri­cul­ture ? » entre juin et novem­bre 2021. Les recom­man­da­tions ont été présen­tées en jan­vi­er 2022 au min­istère de l’Agriculture et de l’Alimentation (MAA).

Troisième secteur émet­teur majeur de gaz à effet de serre (GES) en France et deux­ième à l’échelle mon­di­ale, l’agriculture doit, pour con­tribuer à la neu­tral­ité car­bone, faire évoluer ses sys­tèmes de pro­duc­tion et ses pra­tiques pour à la fois réduire ses émis­sions et stock­er les GES via les puits de car­bone naturels (sols agri­coles, haies). Elle doit égale­ment s’adapter aux aléas cli­ma­tiques qui l’affectent en pre­mier lieu. Ces derniers sont de plus en plus extrêmes et fréquents (hausse des tem­péra­tures, gel, sécher­ess­es, inon­da­tions, grêle, tem­pêtes…). Atten­due par la société civile, elle se tourne, en France, peu à peu, vers l’agroécologie (labels Agri­cul­ture biologique, Haute Valeur envi­ron­nemen­tale), la pro­duc­tion locale et les cir­cuits courts afin, notam­ment, de répon­dre à des enjeux de san­té, la ques­tion du cli­mat étant encore peu prise en compte dans ces dif­férentes démarches.

Toute­fois, mal­gré ce rôle majeur à jouer, le secteur agri­cole n’est encore que trop peu posi­tion­né sur les dis­posi­tifs d’atténuation du dérè­gle­ment cli­ma­tique et peine à trou­ver des mod­èles économiques viables per­me­t­tant un déploiement plus mas­sif des pra­tiques impac­tantes en ter­mes de réduc­tion et séques­tra­tion des émis­sions de GES. Locale­ment, les paiements pour ser­vices envi­ron­nemen­taux se sont dévelop­pés, selon dif­férents mod­èles économiques, mais de façon trop con­fi­den­tielle, ne per­me­t­tant pas cette mas­si­fi­ca­tion. En par­al­lèle, les marchés du car­bone ont été créés : le marché régle­men­té des quo­tas, ciblant surtout des indus­tries (et ain­si sans lien direct avec la chaîne de valeur agri­cole), et un marché volon­taire, à la recherche de crédits. La France fait fig­ure de pio­nnière en la matière avec le développe­ment de dis­posi­tifs comme le label Bas-Car­bone (LBC), lesquels pour­raient venir mod­i­fi­er cet état de fait dans les années à venir si des con­di­tions favor­ables per­me­t­tent leur massification.

Plusieurs fac­teurs peu­vent expli­quer cette faible impli­ca­tion. Tout d’abord, un manque d’informations à dis­po­si­tion des acteurs, en par­tant des modal­ités et con­séquences pour un exploitant agri­cole jusqu’à l’intérêt d’investir dans l’atténuation en France pour les entre­pris­es et les ter­ri­toires. En sec­ond lieu, la régle­men­ta­tion française et européenne se ren­force, mais sans pro­pos­er de cadre glob­al suff­isam­ment cohérent ou d’incitations suff­isantes, par exem­ple invi­tant les entre­pris­es implan­tées en Europe à con­tribuer car­bone en Europe.

Con­cer­nant l’offre et la demande, le manque de vis­i­bil­ité sur l’organisation des marchés et donc sur l’investissement et le risque pris freinent encore cer­tains acteurs. S’ajoute à cela le cadre con­traig­nant du respect des critères de cumul des finance­ments des aides imposées par le décret encad­rant le LBC.

Pour lever ces freins, l’étude con­duite par Green­Flex de juin à octo­bre 2021 présente une série de mesures cocon­stru­ites avec un groupe d’experts du car­bone et du secteur agri­cole et s’appuie sur une analyse bib­li­ographique et une série d’entretiens. La pre­mière mesure pro­posée, à court terme, est la mise en place d’actions de sen­si­bil­i­sa­tion et de for­ma­tion pour l’ensemble des acteurs agri­coles (exploitants et con­seillers, étu­di­ants), mais égale­ment pour les acheteurs à tra­vers une offre française mar­ketée. En sec­ond lieu, la mise en place de régle­men­ta­tions français­es et européennes à la fois inci­ta­tives (fis­cal­ité avan­tageuse) et con­traig­nantes (PAC, direc­tive sur la pub­li­ca­tion d’informations en matière de dura­bil­ité par les entre­pris­es, tax­onomie) a été plébisc­itée. Au-delà, la tran­si­tion agroé­cologique, poussée notam­ment par l’association de « crédits car­bone » et d’une rémunéra­tion val­orisant davan­tage un pro­duit « bas car­bone » serait un levi­er clé, s’appuyant sur un cumul des finance­ments plus flex­i­ble. Enfin, la lev­ée des freins iden­ti­fiés autour des crédits issus du LBC (notam­ment ces­si­bil­ité et fon­gi­bil­ité) est indis­pens­able pour mas­si­fi­er le finance­ment par le secteur privé et les fonds d’investissement. C’est en asso­ciant ces divers­es solu­tions à dif­férentes échelles (européenne, française, locale) qu’une mas­si­fi­ca­tion des dis­posi­tifs d’atténuation du dérè­gle­ment cli­ma­tique en agri­cul­ture pour­ra avoir lieu.

À propos de l'auteur

Élise Bourmeau

Directrice Conseil chez GreenFlex.

Bienvenue sur Innovation24.news,
le portail d'information dédié à l'innovation et au développement durable des publications de Consilde Media Group. Ce site regroupe une sélection d'articles et d'entretiens rédigés par des spécialistes des questions environnementales et publiés dans nos différents magazines.

.