Le mercredi 5 octobre, Bordeaux Métropole et la ville de Bordeaux ont réalisé une expérimentation sur le fret fluvial en cœur de ville. Ainsi, trois zones de déchargement situées à Bordeaux ont été ciblées pour débarquer de la marchandise issue de différents types d’activités économiques.
Ce mode de logistique urbaine permet d’acheminer des marchandises par le fleuve et de réaliser le dernier kilomètre par vélo cargo. Ainsi, le temps d’une journée, des produits agricoles venus du Lot-et-Garonne ont été déchargés sur le ponton Richelieu, des matériaux de construction sont arrivés quai de Bacalan et des biodéchets collectés en bac ont fait l’objet d’un déchargement quai de la Grave. Objectif : tester en réel un mode de transport des marchandises sous-employé à l’heure actuelle.
Favoriser un transport vertueux
Le fret fluvial permet notamment de réduire les émissions de carbone et de fluidifier les déplacements en diminuant la congestion routière. Lorsque les bateaux sont à quai, des vélos cargos prennent le relais pour acheminer la marchandise en cœur de ville, répondant ainsi à la difficulté du « dernier kilomètre ». La capacité d’emport de ce type de vélos oscille entre 180 et 250 kg. L’expérimentation avait pour objectif de cerner les enjeux techniques. Outre l’innovation logistique que représente cette expérimentation, il s’agissait également de remettre en question les modes de consommation et d’approvisionnement local.
À Bordeaux, cette expérimentation a pour but d’interroger les habitants sur l’introduction de nouvelles pratiques en cœur de ville. Les quais sont un lieu de loisirs, de circulation douce et de promenade. Aménager des zones de déchargement ponctuelles ou pérennes nécessite une étude des usages. Autre paramètre à prendre en compte : le classement des façades des quais au patrimoine UNESCO. Le fret fluvial fait partie des potentialités explorées par le schéma directeur des équipements fluviaux voté lors du conseil métropolitain du 30 septembre 2022 et par la Ville de Bordeaux, dont l’apaisement des mobilités est l’une des priorités de mandat.
Relier les territoires nourriciers à l’agglomération bordelaise
Un premier essai de fret fluvial entre le Lot-et-Garonne et Bordeaux avait été réalisé en mai 2021 par Garonne Fertile*. Cinq tonnes de produits alimentaires biologiques ou locaux avaient été acheminées entre Damazan et Bordeaux. Ce collectif regroupe des acteurs privés et publics liés par la volonté commune d’expérimenter le transport fluvial alimentaire entre les territoires nourriciers et l’agglomération bordelaise. Le collectif est soutenu par Bordeaux Métropole, la région Nouvelle-Aquitaine, l’ADEME et la Communauté des communes du confluent et des coteaux de Prayssas.
Lors de cette nouvelle expérimentation, le collectif a chargé 30 tonnes de marchandises issues de la coopérative Manger Bio Sud-Ouest, des magasins Biocoop et de producteurs-paysans pour le restaurant Casa Gaïa. Cette organisation logistique inédite a permis de remettre en lumière un mode de transport abandonné depuis la fin des années 1990 et de mobiliser les territoires sur ces enjeux.
Cette journée d’expérimentation en grandeur réelle a notamment permis :
• l’intégration d’un conteneur frigorifique pour livrer des produits frais ;
• une liaison entre les ports de Damazan (Lot-et-Garonne) et Bordeaux plus rapide, passant de cinq à deux jours ;
• l’utilisation renforcée de caisses en plastique consignées, pour réduire les emballages et optimiser la logistique.
La relance du fret fluvial est une des priorités du programme de transition énergétique de la Communauté de communes du confluent et des coteaux du Prayssas (Lot-et-Garonne).
Sollicitée au départ par des entreprises locales (alliance COMPAS47) voulant transporter autrement leurs marchandises vers Bordeaux, la Communauté de communes a mené une étude technique et financière fin 2021-début 2022. Cette dernière valide la viabilité du modèle économique de la relance, confirmant ainsi l’intuition de plusieurs des acteurs économiques du territoire. La Communauté de communes a souhaité être partenaire de l’expérimentation de Bordeaux Métropole et de l’initiative Garonne Fertile, car elles apportent une approche complémentaire précieuse, en étudiant spécifiquement les conditions de relance du fret fluvial alimentaire et de livraison en hypercentre urbain.
Répondre aux préoccupations des entreprises
Le groupe Boyé Matériaux, représenté par Vetermat, entreprise familiale, implantée à Bordeaux depuis près de 50 ans, spécialisée dans la vente et la transformation des matériaux de façade, et AB Construction Bois, entreprise créée par la génération familiale suivante, est expert dans l’ingénierie de la construction en bois et réalise notamment, en cœur de ville, des chantiers de surélévations techniques.
Le groupe va prochainement déménager son site à Bassens, près de la zone portuaire.
Soucieux de répondre aux enjeux environnementaux, le groupe Boyé a souhaité prendre part à cette expérimentation afin de tester de manière pragmatique une solution logistique pour faciliter et fiabiliser l’acheminement de ses produits vers les chantiers situés en centre urbain.
Cette expérience a permis à l’entreprise de transporter plusieurs palettes de matériaux de construction entre Bassens et le quai de Bacalan, à l’entrée des bassins à flots.
La société Restovalor s’est quant à elle spécialisée dans la collecte des biodéchets issus de la restauration individuelle ou collective. La collecte et l’acheminement des déchets vers des centres de traitement sont réalisés via des véhicules routiers. La société cherche aujourd’hui à proposer un circuit logistique plus vertueux en utilisant des vélos cargos. L’acheminement par bateau de ces déchets vers le site de Bassens s’inscrit dans la volonté d’utiliser à terme l’usine de méthanisation en projet dans ce secteur pour valoriser les matières collectées.
Un bilan complet de cette journée d’expérimentation, réalisé par la mission « Fleuve » de Bordeaux Métropole, va permettre de lister les points forts et les points d’amélioration des process de déchargement sur les quais. À la lumière de ces enseignements, la possibilité de pérenniser le fret fluvial sur la Garonne sera étudiée.
Photo ci-dessus : © J‑B. Mengès — Bordeaux Métropole
