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« La région a un objectif de 418 méthaniseurs en 2030 »

© Stadler - Région Grand Est

Biogaz Magazine : La Région Grand Est a été pionnière en matière de méthanisation. Combien avez-vous d’unités aujourd’hui  ?

Pascale Gaillot : L’élevage et les cultures végétales tiennent une place importante dans la Région Grand Est, puisque nous sommes situés au premier et deuxième rang en France, donc nous disposons d’un potentiel de matières méthanisables  important. C’est pourquoi nous avons très vite accompagné la méthanisation qui permet de pérenniser les exploitations agricoles avec un revenu complémentaire pour les agriculteurs tout en favorisant le déploiement d’une énergie renouvelable et d’une économie locale et durable. Entre 2020 et 2021, nous avons enregistré plus de 24 % d’augmentation du nombre de méthaniseurs et un doublement du nombre d’unités en injection pour 260 unités de méthanisation en fonctionnement fin 2021. Le changement de tarif, la mesure en défaveur des aides ainsi que le coût de l’électricité et des Capex ont cassé cette dynamique en 2022 où nous n’avons recensé que 8 projets, contre 120 en 2021 !

Quelle est la stratégie d’accompagnement de la région pour la filière biogaz ? 

La région a souhaité porter cette filière. Elle joue un rôle d’animation avec pour objectif de mettre autour de la table tous les acteurs de la filière. Dans ce sens, en 2018, nous avons mis en place une charte de la méthanisation durable avec 50 partenaires. Depuis, nous avons porté une charte sur la bioéconomie, les bio-intrants et une autre sur les biocarburants en mettant toujours autour de la table tous les partenaires. Au début, les agriculteurs et les professionnels du gaz ne se connaissaient pas du tout, aujourd’hui, ces deux mondes travaillent ensemble.

La région travaille aussi avec les chambres d’agriculture, notamment pour répondre aux critiques des détracteurs de la méthanisation, sur sa durabilité, sur le retour au sol. Afin de disposer d’éléments concrets pour y répondre, mais aussi pour mesurer l’intérêt réel de la méthanisation à de nombreux égards, nous avons  mis en place il y a 3 ans, avec un cofinancement Ademe, un monitoring de 30 méthaniseurs. Les 30 exploitants ont joué la transparence pour nous confier les éléments tonnage, types d’intrants, volumes de biogaz, mais aussi coûts des différents postes. Cela nous permet aujourd’hui de disposer d’indicateurs  et donc des données publiques économiques et agronomiques qui sont autant d’arguments politiques qui montrent que la méthanisation est une production réellement durable et très bénéfique pour notre territoire. Ces données sont mutualisées bien sûr, et nous respectons la confidentialité de chaque installation. La charte de Méthanisation durable se décline en 4 axes et 21 actions, chacune portée par l’un des partenaires. Un état d’avancement est réalisé au moins une fois par an en comité de pilotage.

Les aides de la région sont aussi financières. Dans le cadre de notre programme Climaxion, cofinancé par  l’Ademe, nous nous mettons d’accord  sur des critères de soutien aux projets. Dans ce cadre, depuis 2017, 145 projets ont été soutenus  pour 45 millions d’euros engagés par l’Ademe et 35 millions par les fonds européens. La Région soutient également : les études préalables pour les porteurs de projet : 220 dossiers ont été soutenus en 5 ans et comme je vous l’indiquais, ils n’ont été que 8 en 2022 !

Vous organisez également 360 Grand Est ?

L’événement 360 Grand Est, organisé par la région, a été mis en place à la suite d’une réflexion sur la dynamique qu’engendrait la transversalité. Le principe est encore de réunir différents groupes dans une démarche d’économie durable, d’innovation et de transformation des entreprises autour de 4 thèmes : numérique, environnement, industrie et santé. Pour le groupe environnement, les entreprises regardent comment gérer l’eau, l’air, le carbone, la biodiversité. 360 Grand Est, 3ème édition, va réunir les forces vives du Grand Est : décideurs publics et privés, start up, chercheurs…  les 22 et 23 juin 2023 au  centre des congrès de Strasbourg, avec des ateliers, des rencontres et une offre de solutions techniques.

Je participe également à la table ronde d’ouverture du salon Expobiogaz, animé par Grégory Lannou, directeur de Biogaz Vallée. Elle aura lieu le 7 juin à 10 h sur le thème « État des lieux — Perspectives d’évolution du marché de la méthanisation et des gaz verts — Grands défis et chantiers pour l’avenir de la filière (LPEC, PPE, CPB, tarifs…) — Focus national et régional Grand Est ».

Quelles sont les perspectives de la Région ?

La Région s’était fixée, en s’appuyant sur une étude des gisements menée par Ensaia et Solagro, un objectif de 418 unités pour une production de 3,6 TWh en 2030. Nous espérons que des mesures nationales permettront  de relancer une dynamique pour cette filière vertueuse qui produit un biogaz renouvelable précieux aujourd’hui. Au-delà de ce chiffrage, la Région Grand Est réfléchit, dans le cadre du 360 Grand Est,   à la décarbonation de l’économie et de l’industrie. La biomasse agricole mais aussi la biomasse forestière font partie des solutions possibles. Dans les perspectives, s’ouvre également la question des usages et là également, la Région se veut exemplaire.  Si je prends le cas des Ardennes, la RDTA, régie de la Région, qui assure le transport scolaire, possède 36 cars roulant au GNV. Aujourd’hui 27% de biogaz circule dans les réseaux de distribution GRDF et GRT ardennais… nous pouvons envisager de déployer l’utilisation routière, nous aidons les collectivités à se doter de stations GNV. Il en va de notre souveraineté énergétique.

À propos de l'auteur

Pascale Gaillot

Présidente de la Commission Environnement, Région Grand Est.

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