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Réindustrialisation décarbonée

La révision de la Stratégie nationale hydrogène constitue une formidable opportunité pour la France de transformer l’essai des premiers jalons solides posés depuis le lancement de cette stratégie en septembre 2020, et d’en faire le leader mondial de l’hydrogène décarboné.

Au premier semestre 2023, les acteurs de la filière et représentants des territoires, fédérés au sein de France Hydrogène, ont appelé le gouvernement à concevoir une stratégie révisée conjuguant décarbonation profonde et réindustrialisation des territoires.

Pour France Hydrogène, « la France a les atouts en main : les gigafactories d’équipements clés de l’hydrogène se construisent ; un tissu de PME-PMI se structure rapidement dans les territoires ; la R&D&I (Recherche, Développement et Innovation) nationale compte parmi les moteurs mondiaux du secteur. Le mix électrique décarboné doit permettre de lancer plus vite des projets sur les différents usages de l’hydrogène, et construire ainsi des champions nationaux avec un avantage compétitif durable. Excédant largement l’ambition initiale de la stratégie, les intentions des acteurs industriels (plus d’un million de tonnes d’hydrogène décarboné) confirment ce potentiel. La révision de la stratégie nationale intervient à un moment charnière pour saisir ce vaste champ d’opportunités.

Alors que le couple décarbonation-réindustrialisation est au cœur du projet d’une filière française de l’hydrogène, il apparaît essentiel que la révision de la stratégie repose simultanément sur la décarbonation à long terme (c’est-à-dire parant au risque « d’effets falaises » successifs sur l’ensemble des secteurs émetteurs) et sur le retour industriel, fiscal et social durable que cela génère dans les territoires. »

Quelle stratégie décarbonée ?

Dans ce cadre, les signataires de ce manifeste appellent à ne pas limiter la stratégie nationale à la décarbonation d’une partie des 50 sites industriels les plus émetteurs. « Prioriser l’allocation de l’hydrogène à quelques secteurs industriels compromettrait lourdement l’effort collectif réalisé par le Gouvernement et les industriels depuis 2020. Les projets de production semi-centralisés jouent un rôle pivot pour le déploiement efficace de l’ensemble des maillons de notre stratégie, et nous saluons à ce titre la place que prévoit de leur donner le Gouvernement dans les différents dispositifs de soutien en cours d’élaboration. En effet, assurer le développement de capacités d’électrolyse de taille intermédiaire est indispensable pour que les équipementiers nationaux puissent monter en charge et réaliser les progrès nécessaires sur la courbe d’apprentissage technologique, venant ainsi dé-risquer les projets centralisés liés à quelques grands sites industriels. » L’ensemble des acteurs, fédérés au sein de France hydrogène, sont mobilisés pour le déploiement d’une filière hydrogène française d’excellence. Ils semblent avoir été entendus.

Soutien à l’hydrogène décarboné

En effet, le gouvernement français a lancé un vaste plan de soutien à la filière hydrogène portant au total sur 9 milliards d’euros. La ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, a annoncé fin août la signature d’un décret pour le lancement d’un mécanisme de soutien à la production d’hydrogène décarboné via des appels d’offres, avec une enveloppe de 4 milliards d’euros pour les projets les plus vertueux.

Dans le détail, ils seront lancés en 2024, 2025 et 2026 pour attribuer des capacités de production, sous forme de tranches de respectivement 150, 250 puis 600 MW. Soit 1 000 MW au total. « Concrètement, les lauréats des appels à projets se verront attribuer une note, fondée à 70 % sur des critères de prix (sur la base d’un ratio euro par tonne de carbone évitée) et à 30 % sur des critères hors prix », peut-on lire dans Le Figaro. Un mécanisme qui a fait ses preuves pour développer l’électricité verte à partir d’énergies renouvelables. L’objectif est ainsi d’effacer les écarts de prix entre la production d’hydrogène carboné et celle d’hydrogène renouvelable. Les contrats seront signés pour une durée de quinze ans. « Nous avons tout d’abord soutenu la construction d’électrolyseurs ou de piles à combustible et maintenant nous sécurisons la production des opérateurs et la rendons compétitive, a ajouté Agnès Pannier-Runacher.

Ce dispositif vise à accompagner les industriels pour acheter les électrolyseurs et produire de l’hydrogène décarboné à un coût compétitif, puisque nous compenserons une partie du coût entre le prix de l’hydrogène sans carbone et le prix de l’hydrogène fabriqué à partir d’énergies fossiles. Cet hydrogène sera utilisé dans différents processus industriels lourds, pour ne plus utiliser d’énergies fossiles, que ce soit pour produire de l’acier, de l’aluminium ou des engrais. L’usine John Cockerill d’Aspach-Michelbach illustre notre politique de réindustrialisation et de décarbonation, a‑t-elle déclaré lors d’une visite, puisque c’est un site lauréat des dispositifs d’accompagnement industriels pour la décarbonation que nous avons lancés depuis 2020. »

« C’est un soutien déterminant, rien de tout ceci n’existerait sans la puissance publique et sans le soutien de l’État et des collectivités locales, a assuré Raphaël Tilot, directeur général de John Cockerill Hydrogen. L’annonce (du plan de 4 milliards d’euros) est très positive, c’est un dispositif lisible, les critères sont tout à fait compréhensibles par les industriels, donc nous voyons cela d’un très bon œil. L’Europe avance en parallèle à ce qui se passe ailleurs dans le monde, où cela va parfois encore plus vite, quand on voit ce qui se passe en Europe du Nord ou en Chine. Donc il faut que la France et l’Europe continuent, si possible encore plus vite ». L’usine doit entrer en production en fin d’année et vise, à l’issue d’une phase de montée en puissance de trois ans, une production annuelle d’électrolyseurs pour une puissance équivalente à 1 000 MW, soit 1 GW, faisant d’elle une gigafactory. L’usine embauchera à terme près de 300 employés, environ un tiers des recrutements ont déjà eu lieu. Elle a bénéficié d’une subvention de 100 millions. « Nous sommes agnostiques sur la nature de l’électricité qui rentrera dans l’électrolyseur, à condition qu’elle soit bas-carbone, elle peut être d’origine nucléaire ou renouvelable, ce sont les porteurs de projets qui décideront », a ajouté le ministère.                                             

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