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Biogaz : les mesures en cours

La filière biogaz, avec ses composantes énergie, agriculture, eau et déchets, a été considérée avec importance. Les professionnels réunis au sein de cette filière ont su faire part des problèmes. Le gouvernement, à travers le ministère de la Transition écologique et solidaire, a donc pris de nombreuses mesures pour assurer la pérennité du secteur biogaz.

En complément, l’Association technique énergie environnement (ATEE) a rédigé un document de synthèse recensant les réponses législatives, intitulé « COVID-19 et production de biogaz », que nous reprenons ici en grande partie et que vous pouvez retrouver in extenso sur : https://atee.fr/energies-renouvelables/club-biogaz/covid-19-et-production-de-biogaz.

Cadre de l’urgence sanitaire

Pour faire face à l’épidémie de COVID-19, la loi no 2020-290 du 23 mars 2020 crée un régime d’état d’urgence sanitaire (article 2) et habilite le gouvernement à légiférer par ordonnances, notamment pour faire face aux conséquences économiques, financières, sociales, juridictionnelles et administratives des mesures prises pour limiter la propagation du virus (article 11). L’état d’urgence, déclaré pour une durée de deux mois suivant l’entrée en vigueur de la loi (article 4 et article 22), soit du 24 mars au 24 mai 2020 a été prolongé jusqu’au 10 juillet 2020 par la loi n° 2020–546. Vingt-cinq ordonnances d’application ont été présentées en Conseil des ministres (à la date du 25 mars 2020). Des dizaines de décrets et arrêtés ont également été publiés. Ces textes ont été précisés par des circulaires et annonces du gouvernement. Voici les mesures applicables au biogaz et à la méthanisation.

Statut de l’activité de méthanisation dans la crise

Le ministre de l’Économie a invité le 18 mars 2020 « tous les salariés des activités qui sont indispensables au fonctionnement du pays à se rendre sur leurs lieux de travail (…) dans les conditions de sécurité sanitaire maximales ». Il n’existe pas à ce jour de liste des secteurs indispensables au fonctionnement du pays. Le ministre de l’Économie avait cité les secteurs de l’agroalimentaire et du traitement des déchets.

– Les méthaniseurs de stations d’épuration sont considérés d’importance vitale, car ils participent à la filière traitement des eaux, selon l’instruction générale interministérielle relative à la sécurité des activités d’importance vitale.

– L’agriculture est considérée comme une activité essentielle (selon un courrier du MAAF à la filière agricole en date du 18 mars 2020). La méthanisation agricole peut donc être considérée comme une activité essentielle.

– S’agissant du traitement des ordures ménagères résiduelles, l’incinération serait prioritaire sur les traitements biologiques.
Ce statut peut avoir un effet sur la priorisation des activités des acteurs de la méthanisation (notamment l’activité des gestionnaires de réseaux, voir ci-dessous).

Délais additionnels de mise en service et gel des contrats d’achat

La mise en service des installations de production de biogaz doit avoir lieu dans un délai de trois ans, à compter de la date de signature du contrat d’achat pour les installations de production de biométhane (article D. 446–10 du Code de l’énergie) et de la date de transmission de l’attestation de conformité pour les installations de production d’électricité à partir de biogaz (article 10 de l’arrêté du 13 décembre 2016). En cas de dépassement de ce délai, la durée du contrat d’achat est réduite de la durée de ce dépassement.

À ce propos, dans un communiqué de presse du 2 avril, le ministère de la Transition écologique et solidaire a annoncé les mesures prises pour gérer la crise de la COVID-19, en saluant les efforts de la filière biogaz pour maintenir l’approvisionnement. Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, a réuni le 2 avril 2020 les acteurs du gaz naturel et du biogaz, explique le communiqué. Les échanges ont porté sur les actions mises en œuvre pour assurer la continuité de l’approvisionnement des consommateurs en gaz naturel tout en assurant la protection des agents et salariés de la filière. La ministre a également annoncé à cette occasion des mesures pour accompagner les projets de production de biogaz dans le contexte d’état d’urgence sanitaire. La ministre et les acteurs ont pu constater que l’approvisionnement en gaz est aujourd’hui totalement assuré, avec un fonctionnement normal des installations et un faible taux d’absentéisme, dans un contexte de baisse de la demande. Enfin, la ministre a salué le dynamisme de la filière biogaz qui porte actuellement de nombreux projets de nouvelles installations, contribuant ainsi à l’atteinte des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Afin d’accompagner les porteurs de projet de production de biogaz actuellement confrontés à des difficultés pour finaliser les projets en cours de construction, la ministre a annoncé :

– des délais additionnels octroyés pour la mise en service des installations de production de biogaz qui sont en chantier afin de ne pas pénaliser les projets ayant pris du retard du fait de la crise sanitaire ;

– une suspension temporaire du contrat d’achat de biogaz pour les installations de production rencontrant des difficultés de fonctionnement, pour diverses raisons, comme le manque d’intrants.

Ces deux mesures étaient attendues et sont donc les bienvenues pour, à tout le moins, éviter trop de casse dans notre filière.

Un courrier avait été précédemment envoyé par la DGEC à EDF OA le 19 mars 2020, pour demander que des délais supplémentaires soient accordés aux producteurs pour la mise en service de leurs unités : « Afin de ne pas pénaliser les projets et compte tenu des circonstances exceptionnelles découlant de l’épidémie de COVID-19 et des mesures prises par les pouvoirs publics pour lutter contre la propagation du virus, des délais seront accordés aux producteurs pénalisés par ces retards liés à l’épidémie de coronavirus. En vue de faciliter la gestion administrative de ces dossiers, des délais forfaitaires seront accordés pour tous les producteurs, quels que soient le dispositif de soutien ou la technologie. Ils seront définis en lien avec les filières lorsque la situation sera rétablie et pourront être différenciés en fonction des technologies. »

Le Club Biogaz et les autres fédérations professionnelles ont travaillé conjointement avec la DGEC pour préciser les modalités d’application de ces annonces.

Délais administratifs additionnels (ICPE, PC)

L’ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période prévoit dans son article 2 des délais additionnels pour tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période d’état d’urgence + un mois. Ces délais sont suspendus et recommencent à courir le 24 juin 2020, dans la la limite de trois mois. Exemple : les délais de recours contre les autorisations ICPE et des permis de construire.

Toutefois, pour les permis de construire, les délais de recours ont été raccourcis par une ordonnance n° 2020–427 publiée au Journal officiel du 16 avril 2020 : les délais de recours contre les permis de construire n’ayant pas expiré avant le 12 mars 2020 sont suspendus et recommencent à courir le 24 mai 2020 et ne peuvent expirer avant le 31 mai 2020, et les délais de recours contre les permis de construire qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et la fin de l’état d’urgence commencent à courir le 24 mai 2020.

L’article 3 de l’ordonnance prévoit que la durée de validité des autorisations, permis et agréments qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020, est prolongée dans un délai de trois mois suivant le 23 juin 2020. Exemple : la durée de validité du permis de construire (trois ans, article R* 424–17 du Code de l’urbanisme).

L’article 7 de l’ordonnance (modifié par l’ordonnance n° 2020–560 du 13 mai 2020) prévoit que les délais prévus pour que l’administration, une collectivité territoriale, un EPA, ou une personne publique ou privée chargée d’une mission de service public rende une décision ou rende un avis, qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020, ou qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et le 23 juin, sont suspendus et recommencent à courir le 24 juin 2020. Il en va de même des délais impartis aux mêmes organismes ou personnes pour vérifier le caractère complet d’un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande ainsi qu’aux délais prévus pour la consultation ou la participation du public. Exemples : les délais d’instruction des dossiers ICPE (articles R.181 à D.181–44‑1 et articles R.122–6 à R.122–7 du Code de l’environnement), le délai d’information du public de l’organisation d’une enquête publique (article L.123–10 du Code de l’environnement), les délais d’instruction des permis de construire.

L’article 8 de l’ordonnance prévoit que les délais imposés par l’administration à toute personne pour réaliser des contrôles et des travaux ou pour se conformer à des prescriptions de toute nature sont, lorsqu’ils n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020, suspendus du 12 mars au 23 juin 2020. Sont concernés l’ensemble des délais et procédures administratives applicables aux unités de méthanisation. Exemples : les contrôles ICPE (tous les cinq ans en déclaration ICPE, au moins tous les trois ans en autorisation), les contrôles périodiques des installations de cogénération biogaz prévues par l’article L.314–7‑1 du Code de l’énergie.

L’article 9 prévoit qu’un décret détermine les catégories d’actes, de procédures et d’obligations, visés par les articles 7 et 8 de l’ordonnance, pour lesquels, pour des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, de sécurité, de protection de la santé, de la salubrité publique, de préservation de l’environnement et de protection de l’enfance et de la jeunesse, le cours des délais reprend. Le décret n° 2020–383 du 1er avril 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de COVID-19 ainsi que le décret n° 2020–453 du 21 avril 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de COVID-19 prévoient que le cours des délais reprend pour :

– les délais applicables aux mesures, contrôles, analyses et surveillances ayant pour objet la sécurité, la protection de la santé et de la salubrité publique et la préservation de l’environnement prescrits par les arrêtés et décisions du code de l’environnement (mesures de surveillance prévues dans le cadre des arrêtés de prescriptions ICPE) ;

– les délais applicables aux mesures de suivi en service des équipements sous pression (article R. 557–14‑4 du Code de l’énergie) ;

– les mesures de pollution en entrée et sortie de stations d’épuration (avec possibilité d’aménagement : pour les STEP où au moins 52 mesures de contrôle sont prévues : autocontrôle, à la même fréquence ; pour les autres : reprise des mesures à la fin de l’état d’urgence) ;

– la transmission du plan prévisionnel d’épandage de boues de stations d’épuration (article 3 de l’arrêté du 8 janvier 1998) ;

– l’élaboration et l’application d’arrêtés de prescriptions et d’arrêtés de prescriptions complémentaires en enregistrement ICPE ayant pour objet la sécurité, la protection de la santé et de la salubrité publique et la préservation de l’environnement (le préfet prend, après avis de la commission départementale consultative compétente, des prescriptions complémentaires dans le cas où les prescriptions générales prévues par l’arrêté de prescriptions pour les installations en enregistrement ne sont pas suffisantes : article L. 512–7‑5 du Code de l’environnement) ;
– certains délais concernant les gestionnaires de réseaux électriques : mécanismes de valorisation et de rémunération des effacements, mécanisme de capacité, mécanismes d’ajustement, de responsabilité d’équilibre et de réserves.

Épandage des boues de stations d’épuration urbaines

Le ministère de l’Agriculture (MAAF) et le ministère de l’Écologie (MTES) ont diffusé une instruction aux préfectures sur l’épandage de boues de stations d’épuration.

L’instruction distingue :

– les boues de stations d’épuration urbaines extraites avant le début de l’épidémie : elles peuvent être épandues sans restriction (dans le respect de la réglementation en vigueur, notamment l’arrêté du 8 janvier 1998), à condition de ne pas être mélangées à des boues plus récentes ;

– les boues de stations d’épuration urbaines extraites depuis le début de l’épidémie : le texte distingue les boues ayant fait l’objet d’un traitement d’hygiénisation qui inactive le virus et celles qui n’en ont pas fait l’objet. Les boues méthanisées en thermophile sont considérées comme hygiénisées et peuvent donc être épandues. Elles doivent toutefois faire l’objet d’une surveillance renforcée par un enregistrement du suivi des températures et d’un doublement de la fréquence des analyses microbiologiques prévues par l’article 16 de l’arrêté du 8 janvier 1998, notamment pour la surveillance de E. Coli.

Voir aussi la rubrique « Délais administratifs additionnels » ci-dessus, concernant la reprise des délais pour les mesures de pollution en entrée et sortie de stations d’épuration et la transmission des plans prévisionnels des épandages de boues de stations d’épuration (décret n° 2020–453 du 21 avril 2020).

Les activités des gestionnaires de réseaux

– Pour le biométhane : GRDF a un plan d’activité et a classé ses activités en fonction de leur ordre de priorité, de 0 à 2. Les activités classées 0 sont urgentes (c’est le cas des maintenances de correction pour raison de sécurité). Les maintenances préventives et curatives sont de niveau 1, c’est-à-dire qu’elles sont considérées comme essentielles et il n’est possible de se déplacer que s’il y a des ressources disponibles. GRDF et GRTgaz ont envoyé un courrier aux porteurs de projet et producteurs. GRTgaz continue ses activités prioritaires.

– Pour l’électricité : Enedis, qui était passé en service minimum (seules étaient assurées les activités strictement nécessaires au maintien de la continuité de fourniture d’électricité et à la sécurité des personnes et des biens) depuis lundi 16 mars 2020, confirme avoir, en lien avec les pouvoirs publics et au regard de la situation sanitaire, relancé progressivement ses activités depuis le 11 mai, en priorisant les interventions destinées à accompagner au plus près la reprise de l’activité du pays et à répondre au mieux aux attentes de ses clients (raccordements, mises en service, modification de la puissance des compteurs, pose des compteurs Linky…). Les autres activités reprendront au fur et à mesure de l’évolution de la situation sanitaire.

Mesures transversales

Ces mesures viennent s’ajouter aux mesures transversales interentreprises du gouvernement. Vous pouvez retrouver ces mesures détaillées sur https://atee.fr/energies-renouvelables/club-biogaz/covid-19-et-production-de-biogaz. Le ministère a aussi publié des fiches de recommandations sur la sécurité au travail dans le cadre de la crise sanitaire, dont une fiche « Activité agricole ». Les fiches sont disponibles sur http://www.inrs.fr/actualites/COVID-19-fiches-conseils-salaries-et-employeurs.html

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