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Électrolyse : principe et rendement

Comme nous le rap­pelle France Hydrogène sur son site, la décom­po­si­tion de l’eau par élec­trol­yse s’écrit de per­met de sépar­er l’oxygène de l’hydrogène (H2O  H2 + ½ O2). Cette décom­po­si­tion néces­site un apport d’énergie élec­trique dépen­dant essen­tielle­ment de l’enthalpie et de l’entropie de réac­tion. Les valeurs clas­siques des poten­tiels de cel­lules indus­trielles sont de l’ordre de 1,7 à 2,1 V, ce qui cor­re­spond à des ren­de­ments d’électrolyse de 70 à 85 %. La con­som­ma­tion élec­trique des élec­trol­y­seurs indus­triels (aux­il­i­aires com­pris) est générale­ment de 4 à 5 kWh/Nm3 d’hydrogène produit.

L’alimentation min­i­male en eau d’un élec­trol­y­seur est de 0,8 L/Nm3 d’hydrogène pro­duit. En pra­tique, la valeur réelle est proche de 1 L/Nm3. L’eau intro­duite doit être la plus pure pos­si­ble car les impuretés demeurent dans l’équipement et s’accumulent au fil de l’électrolyse, per­tur­bant in fine les réac­tions élec­troly­tiques par :

- La for­ma­tion de boues,

- L’action des chlorures sur les électrodes.

Une spé­ci­fi­ca­tion impor­tante sur l’eau porte sur sa con­duc­tiv­ité ion­ique (qui doit être inférieure à quelques μS/cm). Une cel­lule d’électrolyse est con­sti­tuée de deux élec­trodes (anode et cath­ode, tous deux con­duc­teurs élec­triques) reliées à un généra­teur de courant con­tinu, et séparées par un élec­trolyte (milieu con­duc­teur ionique).

Cet élec­trolyte peut être :

- Soit une solu­tion aque­use acide ou basique,

- Soit une mem­brane polymère échangeuse de protons,

- Soit une mem­brane céramique con­duc­trice d’ions O2-.

Il existe de nom­breux four­nisseurs pro­posant des tech­nolo­gies très diver­si­fiées, notam­ment en ter­mes de nature de l’électrolyte et de tech­nolo­gie asso­ciée, allant d’un pos­si­ble cou­plage amont avec une ali­men­ta­tion élec­trique renou­ve­lable (pho­to­voltaïque ou éoli­enne), à la four­ni­ture finale directe d’hydrogène sous pression.

Les tech­nolo­gies

Elles sont de deux natures et por­tent d’une part sur le type de struc­ture (monopo­laire ou bipo­laire) et d’autre part sur le type d’électrolyte : alcalin, PEM2 (ou acide) ou SOEC (tech­nolo­gie SOFC). Les pre­miers appareils d’électrolyse dis­po­saient d’électrodes monopo­laires (c’est-à-dire que chaque anode est con­nec­tée au pôle posi­tif et chaque cath­ode au pôle négatif), les cel­lules d’électrolyse fonc­tion­nent alors en par­al­lèle. Les sys­tèmes bipo­laires, dévelop­pés par la suite, utilisent des plaques inter­calaires jouant le rôle d’anode d’un côté et de cath­ode de l’autre, les cel­lules d’électrolyse fonc­tion­nent alors en série. La con­duc­tion élec­trique s’opère à l’intérieur de l’électrode au tra­vers de son épais­seur qui présente une chute ohmique, faible mais non nulle. Les assem­blages bipo­laires offrent l’avantage d’une den­sité de courant plus élevée et d’une meilleure com­pac­ité. Cette con­cep­tion intro­duit cepen­dant une dif­fi­culté sup­plé­men­taire : l’électrode présente une face en milieu oxy­dant (anode) et l’autre en milieu réduc­teur (cath­ode). La grande majorité des sys­tèmes indus­triels reposent sur la tech­nolo­gie bipo­laire, alors que quelques four­nisseurs d’électrolyseurs de petite capac­ité pro­posent encore des struc­tures mono polaires. Les cel­lules d’électrolyse doivent être étanch­es, isolées élec­trique­ment et résis­tantes à la cor­ro­sion dans des con­di­tions de tem­péra­ture et pres­sion par­fois élevées.

Avec l’électrolyse alca­line les réac­tions sur les élec­trodes sont les suivantes :

À l’anode : 2 OH — → ½ O2 + H2O + 2 e-

A la cath­ode : 2 H2 + 2 e- → H2 + 2 OH-

(Source : France Hydrogène — Th. Alleau, revu févri­er 2023)

Élec­trol­yse alcaline

L’électrolyse alca­line est le procédé le plus employé dans l’industrie et est donc mature. Les élec­trol­y­seurs se présen­tent en mod­ules de petite ou moyenne capac­ité (0,5–800 Nm3/h d’hydrogène), util­isant une solu­tion aque­use d’hydroxyde de potas­si­um (ou potasse KOH) dont la con­cen­tra­tion varie en fonc­tion de la tem­péra­ture (typ­ique­ment de 25 % en masse à 80 °C jusqu’à 40 % à 160 °C). La potasse est préférée à la soude, essen­tielle­ment pour des raisons de con­duc­tiv­ité ion­ique supérieure à niveaux de tem­péra­ture équiv­a­lents, et de meilleur con­trôle des impuretés chlorures et sul­fates. Incon­vénient, le KOH, déli­cat à manip­uler, peut présen­ter de prob­lèmes de corrosion.

Elec­trol­y­seur PEM AREVA H2Gen/CETH2 120 Nm3/h (2015). © France Hydrogène

Les mod­ules com­pren­nent générale­ment : une ali­men­ta­tion élec­trique, des cel­lules d’électrolyse, une unité de purifi­ca­tion de l’eau, une unité de déshu­mid­i­fi­ca­tion des gaz, une unité de purifi­ca­tion de l’hydrogène, un com­presseur et un sys­tème de con­trôle-com­mande. Cer­taines tech­nolo­gies d’électrolyseurs fonc­tion­nent directe­ment sous pres­sion. Les mod­ules de petite capac­ité opèrent typ­ique­ment de 3 à 30 bars.

À not­er que plusieurs lab­o­ra­toires mènent des travaux de R&D sur les piles à com­bustible alca­lines pour rem­plac­er l’électrolyte liq­uide par des mem­branes solides con­duc­tri­ces d’anions OH-. En cas de suc­cès, non encore acquis, ces mem­branes pour­raient trou­ver une appli­ca­tion dans l’électrolyse alcaline.

Une autre tech­nolo­gie alca­line : l’AEM avec des mod­ules de 1 MW de puis­sance est en développe­ment. Ce procédé est une vari­ante d’électrolyseur alcalin avec un élec­trolyte col­lé imbibé mais sans solu­tion aque­use. Plus com­pacte, moins coû­teuse en con­som­ma­ble, elle pour­rait apporter une plus-val­ue en sécu­rité et en coût.

L’électrolyse SOEC5

SOEC : Sol­id Oxide Elec­trol­y­sis Cell

Élec­trol­yse acide PEM (Pro­ton Exchange Mem­brane)

L’électrolyse acide se dis­tingue de la précé­dente par un élec­trolyte solide à mem­brane polymère con­duc­trice de pro­tons (voir sché­ma). Les avan­tages de cette tech­nolo­gie sont l’absence d’électrolyte liq­uide, la com­pac­ité, la sim­plic­ité du design et du fonc­tion­nement, la lim­i­ta­tion des prob­lèmes de cor­ro­sion, des per­for­mances sen­si­ble­ment supérieures et une moin­dre influ­ence de la vari­a­tion des con­di­tions d’entrée (intéres­sant pour les sources renou­ve­lables inter­mit­tentes). Cepen­dant, le coût de la mem­brane polymère et l’utilisation d’électro-catalyseurs à base de métaux nobles con­duisent à des équipements aujourd’hui plus onéreux que les élec­trol­y­seurs alcalins de même capac­ité. L’électrolyse à mem­brane polymère est con­sid­érée, néan­moins, par beau­coup, comme une tech­nolo­gie d’avenir, car elle béné­fi­cie des nom­breux développe­ments sur les piles à com­bustible de tech­nolo­gie com­pa­ra­ble et de la réduc­tion des coûts associée.

Ces unités peu­vent opér­er de la pres­sion atmo­sphérique à plusieurs dizaines de bars, voire quelques cen­taines de bars. Ce type d’électrolyseur est par­ti­c­ulière­ment adap­té au cou­plage à une source d’énergie renou­ve­lable, car il sup­porte, mieux que l’électrolyseur alcalin, les vari­a­tions de puis­sance élec­trique disponible. Les ren­de­ments des deux familles d’électrolyseur sont aujourd’hui très proches l’un de l’autre et approchent, pour les plus puis­santes, une valeur voi­sine de 90 %. Les normes et codes sur la con­cep­tion et/ou l’installation d’électrolyseurs de petite capac­ité sont en cours d’élaboration, notam­ment au sein de l’ISO TC 1974 dédié aux tech­nolo­gies de l’hydrogène.

L’élec­trol­yse à mem­brane polymère de petite capac­ité est d’ores et déjà une tech­nolo­gie mature, util­isée depuis plusieurs dizaines d’années pour des appli­ca­tions sous-marines (usines à oxygène à bord des sous-marins nucléaires améri­cains et bri­tan­niques) et spa­tiales (pour la généra­tion d’oxygène dans les com­par­ti­ments vie de satel­lites). Les sous-marins nucléaires français sont actuelle­ment équipés d’électrolyseurs alcalins, mais devraient pass­er prochaine­ment en tech­nolo­gie PEM.

À not­er : l’eau pure étant plus rare que l’eau de mer, de plus en plus de sys­tèmes ne dis­posent que d’eau de mer. Il y a alors deux solutions :

- Soit traiter l’eau de mer comme on le fait dans des instal­la­tions de dessale­ment (éva­po­ra­tion ou osmose inverse),

- Soit, comme il a été récem­ment pro­posé par le Lei­den Insti­tute of Chem­istry, de dépos­er à l’anode, avec l’iridium, un oxyde de man­ganèse qui y empêcherait la for­ma­tion de chlore.

Élec­trol­yse à haute tem­péra­ture (PCFC ou SOEC)

Cette tech­nolo­gie est directe­ment issue des développe­ments de la pile à com­bustible de type PCFC ou SOFC (voir sché­ma), fonc­tion­nant respec­tive­ment dans les gammes 400 à 600 °C et 650 à 1000 °C. Elle se révèle intéres­sante si on l’alimente à la fois en élec­tric­ité et en chaleur pour main­tenir la tem­péra­ture élevée souhaitée ; le ren­de­ment peut alors être supérieur à 80 % si on ne prend pas en compte la chaleur de vapor­i­sa­tion de l’eau. Cette tech­nolo­gie sépare l’eau en H et O à l’état de vapeur, ce qui demande moins d’énergie. Elle est essen­tielle­ment des­tinée à être cou­plée à un sys­tème solaire à con­cen­tra­tion ou à un réac­teur nucléaire à haute tem­péra­ture. Elle est au stade du développe­ment dans divers lab­o­ra­toires comme CERAMATEC, Ida­ho Nation­al Engi­neer­ing and Envi­ron­men­tal Lab. aux USA et au CEA/LITEN en France.

Le sys­tème réversible SOEC/SOFC de Boe­ing (2016). © France Hydrogène

Une tech­nolo­gie com­plé­men­taire est en cours de développe­ment : il s’agit du cou­plage des deux fonc­tions d’électrolyse et de pile à com­bustible au sein d’un même appareil dans la mesure où l’électrolyse et la pile à com­bustible sont deux tech­nolo­gies dont les fonc­tion­nements sont réversibles. Divers­es entités, publiques et indus­trielles, com­men­cent, depuis le début 2016, à s’y intéress­er en appli­quant la tech­nolo­gie SOEC/SOFC ; c’est le cas de la start-up française Sylfen issue du CEA et aux États-Unis de l’association Boe­ing, Hunt­ing­ton Beach et Sun­fire. Le pre­mier démon­stra­teur Sylfen (Smart Ener­gy Hub, bap­tisé rSOC) a été validé en mai 2018.

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