Biogaz Magazine Biogaz

Fin du moteur thermique : la fausse bonne idée ?

Mi‑février, la Commission européenne a dévoilé ses propositions pour encadrer les véhicules lourds (camions, autobus…), qui génèrent 6 % des émissions de gaz à effet de serre. Pour les poids lourds vendus à partir de 2030, les émissions devraient être réduites d’au moins 45 % « en moyenne » par rapport aux niveaux de 2019, puis de 65 % à partir de 2035, et de 90 % à partir de 2040, selon ce texte qui sera négocié entre états et eurodéputés. Des exemptions sont prévues pour certains véhicules (pompiers, police, armée, ambulances…). Bruxelles souhaite par ailleurs que tous les nouveaux bus mis en service dans les villes de l’UE à partir de 2030 soient « zéro émission ».

Ces décisions sont non seulement un suicide pour l’économie européenne, mais en plus elles ne sont pas écologiques, la production des véhicules à batterie générant en ACV autant, sinon plus (selon certains experts), de CO2 que les véhicules thermiques au BioGNV (voir pages précédentes). Condamner les véhicules thermiques revient à condamner un bioGNV vertueux. Le bon sens serait d’inciter (même fortement)  à aller vers des véhicules à basses émissions de GES calculées bien sûr en analyse cycle de vie, mais pas d’interdire une technologie, ce qui la condamne alors qu’elle peut se révéler vertueuse, avec le BioGNV par exemple. Les députés européens ont-ils la compétence en la matière ou agissent-ils par dogmatisme, ce qui peut s’avérer catastrophique pour l’Europe et l’environnement ?

Les VE consomment 6 fois plus de métaux !

Lors d’une conférence en 2022 sur « les métaux stratégiques pour la transition énergétique », Christophe Poinssot, directeur général adjoint et directeur scientifique du BRGM, a rappelé que les véhicules électriques consommaient 6 fois plus de métaux que les véhicules à moteur thermique. Il a indiqué également que, pour atteindre les ambitions affichées de l’UE de la transition énergétique et de la numérisation de nos sociétés « il faudra produire plus de ressources minérales d’ici 2050 que depuis le début de l’humanité ». Cette phrase devrait interpeller nos élus et toutes les instances de représentations : est-ce possible ? Avec quel réel bilan écologique ?

À l’heure où l’on voit que les ZFE multiplient les dérogations et les retards, le mur de la réalité pourrait se heurter très prochainement à l’arrêt des moteurs thermiques prévu par l’UE à la date de 2035 pour les voitures et désormais de 2040 pour le transport lourd. Même l’Allemagne et l’Italie semblent freiner pour leur interdiction. La logique européenne d’associer des interdictions à une technique au lieu de l’associer à un bilan CO2 est sidérante : un mélange de complexité administrative et d’arrêts des innovations sur fond de lobbyisme. Même les USA ont eu la logique pragmatique de régler leur loi de transition sur les émissions de CO2 et non sur une technique donnée. Sans compter la destruction d’une filière automobile européenne au profit d’une filière chinoise qui se soucie bien peu des émissions de GES. La fin du moteur thermique pourrait donc bien finalement générer plus d’émission de CO2 en analyse de cycle de vie (ACV). Les véhicules à batterie, s’ils émettent moins de CO2 au pot d’échappement, en émettent autant finalement que les véhicules fonctionnant au BioGNV et même plus selon certains scientifiques comme Aurore Stéphant, ingénieure géologue minier, spécialisée dans les risques sanitaires et environnementaux des filières minérales. D’après elle, les VE émettent au total 2 fois plus de CO2 que les moteurs et 1 à 2 fois plus de Nox et de dioxine de souffre en calculant les émissions en analyse de cycle de vie et en intégrant les composants électroniques. En effet, les véhicules électriques consomment 6 fois plus de métaux qu’un véhicule classique, ce qui nécessite des déplacements de quantité importante de terre et des technologies d’extraction très polluantes. Il faudrait, d’après le BRGM, 42 fois plus de lithium, 7 fois plus de terre rare, 20 fois plus de nickel et 21 fois plus de cobalt pour atteindre les objectifs actuels. La numérisation de l’économie consommera nettement plus de métaux et d’énergie. Par ailleurs, la consommation électrique engendrée par un parc de véhicules entièrement électrique capterait la majorité de notre production actuelle d’électricité !

Ve = CO2

Mais après le prix de l’énergie totalement artificiel, peut-on encore s’étonner des dérives de cette machine kafkaïenne ! Il serait temps que les industriels, que les entreprises de ce pays et leurs représentants, y compris les instances agricoles, tapent du poing sur la table au lieu de suivre une institution en pleine dérive d’autoritarisme administratif. Ces décisions d’arrêt du moteur thermique risquent de stopper net toutes les productions de carburants alternatifs. Parmi ceux de deuxième génération, le BioGNV, qui est produit à partir de déchets sans concurrence avec des cultures alimentaires, est particulièrement vertueux avec des émissions carbone identiques voire plus faibles que les véhicules électriques. Un temps d’adaptation est en plus nécessaire pour faire évoluer la filière vers des techniques alternatives. L’UE et la France seraient-elles en train de se tromper totalement de combats sur la transition de la mobilité ? Un réajustement scientifique, un (vrai) débat et un vote éclairé loin de toute mesure idéologique sont vivement souhaitables à ce sujet. Il semble qu’aller vers une mobilité 100 % électrique n’est pas écologique et nous conduise vers un désastre. Les véhicules électriques ont leur place. Aller vers les trottinettes, les vélos ou les mini-voitures citadines pour réduire les émissions de particules en zones urbaines concentrées est adapté. Mais aller vers une mobilité 100 % électrique semble une déraison. 

À propos de l'auteur

Biogaz Magazine

Par la rédaction de Biogaz Magazine.
Créé en 2018, le média professionnel Biogaz Magazine est rapidement devenu un support d’information et de communication de référence, consacré à l’innovation technologique et au développement de la filière biogaz, mais aussi de l’ensemble des valorisations énergétiques : pyrogazéification, méthanation, power to gas

À destination des acteurs économiques et industriels du secteur, du monde agricole et des pouvoirs publics (ministères, collectivités territoriales, etc.) Biogaz Magazine, membre du cluster Biogaz Vallée, est partenaire des principaux événements professionnels en France et en Europe, ainsi que des principales fédérations et organisations du secteur. La revue permet ainsi à ses annonceurs de bénéficier d'une surface de diffusion large et unique auprès d’un public cible constitué d’acteurs et de décideurs de la filière, mais également du relais nécessaire auprès des décideurs politiques, économiques et des ministères concernés.

Bienvenue sur Innovation24.news,
le portail d'information dédié à l'innovation et au développement durable des publications de Consilde Media Group. Ce site regroupe une sélection d'articles et d'entretiens rédigés par des spécialistes des questions environnementales et publiés dans nos différents magazines.